J’ai failli devenir arbitre juste pour payer mon loyer

Je n’aimais pas le football, mais j’ai failli devenir arbitre rien que pour payer mon loyer.

Fin 2013, je regarde mon compte bancaire et je prends conscience qu’il me faut une entrée d’argent supplémentaire.

J’étais en 2ème année de DUT à Grenoble et malgré les deux bourses que j’avais eues, mes prévisions budgétaires me disaient que je ne pouvais pas tenir jusqu’à la fin de l’année, et surtout la bourse n’était pas garantie l’année suivante.

Je fais un CV et je candidate à tous les jobs étudiants qui bougent : fast-food, hôtel, restaurant, supermarché, mairie.
Après l’envoi par mail et le dépôt physique de plus d’une vingtaine de CV sans succès, je décide de changer de stratégie. Je regarde du côté du sport.

En Europe, pour joindre les deux bouts, certains étudiants se transforment en arbitres dans les championnats locaux. Même si je n’aime pas le football, c’était accessible car c’est le seul sport dont je connaissais quelques règles. Je me suis donc lancé.

En fait, dans le département de l’Isère, pour être arbitre de football il fallait :

           - Avoir une licence avec une équipe du championnat

           - Avoir un diplôme du District de football de l’Isère

Chaque match était rémunéré d’une indemnité de 25 euros en plus des frais kilométriques allant de 20 à 40 euros par match en fonction de la distance. Le calcul était simple : arbitrer deux matchs par week-end et viser une indemnité de 40 euros minimum par match, et donc un revenu de 320 euros par mois. 

J’ai appelé le district le même jour pour savoir quels étaient les clubs à la recherche d’arbitres et, coup de chance, mon interlocuteur connaissait un coach à Saint-Martin-d’Hères qui recherchait un arbitre pour son club.
Quelques semaines plus tard, j’avais la licence du club et une inscription pour la formation d’arbitre. C’était un week-end ensoleillé dans un petit village de montagne de l’Isère.
En un week-end j’ai appris dans le détail toutes les règles du football. J’ai participé aux mises en situation et je suis rentré chez moi avec mon diplôme d’arbitre.

Il ne fallait plus qu’attendre le début de la saison pour faire deux stages avec des arbitres expérimentés et commencer à son tour à manger l’argent de l’arbitrage. Parce que pour dire vrai, ma seule motivation était l’argent. J’ai très peu d’intérêt pour le football.
Au final, je n’ai jamais mangé l’argent de l’arbitrage. En fait, en septembre 2014, j’ai dû changer de ville. J’ai quitté Grenoble pour Annecy. J’avais trouvé une bonne formation là-bas. Vous savez, pour le fameux diplôme.

Arrivé dans le monde de l’arbitrage par cupidité, j’y ai rencontré des personnes passionnées. Toutes ces personnes qui travaillaient comme bénévoles dans des associations de football dans tout le département. Ces personnes qui dédiaient une partie de leur vie à leur passion gratuitement.
J’en suis sorti avec des doutes sur la question de l’argent. J’y ai appris que le manque d’argent nous fait croire que seul l’argent doit guider nos choix. 

Mais peut-on donner le meilleur de soi quand on n’aime pas ?
En tout cas, aujourd’hui je peux dire que l’argent soulage, mais il n’inspire pas. Ce qui donne du sens, ce n’est pas ce qu’on gagne, mais ce qu’on apprend et ce qu’on construit en chemin.