C’est la phrase que j’entends le plus souvent dans la bouche des Africains installés en Occident. Elle sonne comme une promesse. Une façon de dire au pays : je ne t’ai pas oublié, je reviendrai.
Sauf que… presque personne ne rentre vraiment. Même si on dit presque tous :
Et pourtant, les années passent, et nous sommes toujours là. Moi-même, le premier. À force de bâtir notre vie ici, nous avons pris, sans nous en rendre compte, une série de décisions qui nous attachent au sol européen : travail, mariage, enfants, crédits, promesse de retraite, école, habitudes.
Chaque décision semblait anodine. Ensemble, elles ont fini par tisser une toile difficile à quitter. En plus on n’avait pas de vrai plan à l’arrivée. Juste un rêve vague : Fuire « le continang » . C’est pour ça que je crois qu’avant de rêver du retour, il faut comprendre ce qui nous retient.
Dans la communauté Campus Mbe, nous voulons aborder cette question autrement : réfléchir au retour comme un projet structuré, pas comme une nostalgie. Construire un modèle de vie en Occident qui laisse la porte du retour ouverte.
Rejoins-nous.
On va tester, ensemble, une expérience grandeur nature : comment rentrer sans tout perdre, et sans
se perdre.
Parce que rentrer, ce n’est pas un retour en arrière. C’est une continuité qu’il faut préparer.
la première question qu’elle m’a posée a été :
— Tu crois que tes enfants vont revenir au Cameroun ?
J’ai mis du temps à répondre. Sa voix tremblait un peu au téléphone. J’ai compris que ce n’était pas une simple question, mais une peur qui parlait. Elle était inquiète. Pour elle, les enfants suivent toujours leur mère. Ma femme n’étant pas Camerounaise, c’était perdu d’avance.
Je n’ai pas ri au téléphone, par respect — et parce que j’entendais l’inquiétude dans sa voix. J’ai essayé de la rassurer… puis je me suis marié. Mais la vérité, c’est que j’étais naïf. Pas à cause de l’origine de ma femme, mais parce que je ne mesurais pas encore les enjeux du mariage pour un Africain en Occident.
Après les études, beaucoup d’entre nous se posent les mêmes questions :
Ce que je sais aujourd’hui, c’est que si tu choisis mal ta / ton partenaire, tu hypothèques déjà une grande partie de ta vie.
C’est pour cela que, dans Campus Mbe, nous portons une attention particulière à la question du mariage à l’étranger. L’objectif : t’aider à te poser les bonnes questions avant de t’engager dans une aventure qui dépasse le simple amour.
]]>Pas parce que je l’ignorais, mais parce qu’au Cameroun, la question ne se posait tout simplement pas. Quand j’étais petit, je voyais les blancs à la télé, ou parfois dans la rue, au marché, une fois par mois peut-être. C’était rare, presque exotique, mais sans grande importance.
C’est une fois arrivé en Occident que j’ai découvert ma couleur — non pas dans le miroir, mais dans le regard des autres. Je me souviens encore d’un jour à la plage d’Odessa. Un petit garçon, à peu près de l’âge de mon fils Akil, s’est approché de moi, m’a pris la main, puis a regardé la sienne comme pour vérifier si ma peau pouvait déteindre. Il a ensuite couru vers sa mère, émerveillé. Moi, je suis resté là, mi-amusé, mi-troublé.
Beaucoup de jeunes Africains vivent ce même moment sans s’y attendre. Avant de partir, ils ne se sont jamais vraiment posé la question de leur identité. Et un jour, brutalement, ils découvrent qu’ils sont “noirs”… parce que le monde le leur rappelle.
Certains finissent par vouloir fuir ce miroir : ils évitent les leurs, changent d’accent, rejettent la nourriture du pays, disent qu’ils ne supportent plus la chaleur du Cameroun. Je crois qu’aller à l’étranger sans se connaître soi-même, c’est risquer un effacement programmé.
C'est pour éviter ces chocs et traumatismes que dans la communauté Campus Mbe. Une attention particulière sera portée à l'identité. L'objectif étant d’apprendre à se connaître, à se situer, à s’affirmer. Pour ne pas laisser nos petits frères se perdre en se cherchant.
]]>Il disait que c’était pour m’apprendre à gérer mon argent. En règle générale, ça se passait bien. Je réussissais à tenir sur la semaine, même si, de temps en temps, le mercredi, j’étais à sec. Parce qu’une petite m’avait gratté ou parce que j’avais fait la fête.
Mais j’avais mon backup : ma mère, qui était toujours là au cas où.
Quand je travaillais en France comme veilleur de nuit, je gagnais 1 000 € nets par mois. Un beau budget que je gérais bien. Je m’étais même payé des vacances au Cameroun en 2015. En 2017, quand je suis devenu ingénieur à temps plein et que j’ai reçu mon premier salaire supérieur à 2 000 €, c’était la fête. C’était beaucoup. Je dépensais, ça ne finissait pas . J’ai très vite augmenté mon niveau de vie : appartement plus grand, nouvelle voiture, voyages par-ci, par-là. Très vite, j’ai compris que 2 000 € pouvaient être “petits”.
C’est comme ça que j’ai redécouvert le découvert… et les paiements en plusieurs fois. La vie m’a enseigné. Beaucoup de gars arrivent en Occident avec presque zéro notion de gestion de budget. Et même ceux qui savent gérer ne connaissent pas les pièges sophistiqués des organismes de crédit des pays occidentaux.
Beaucoup se retrouvent piégés. C’est pourquoi, dans notre communauté Campus Mbe, on met un point d’honneur sur la gestion du budget. Parce qu’on sait que, quel que soit le montant de tes revenus, si tu ne sais pas gérer un budget… tu vas seulement lire l’heure.
]]>Ils avancent sans fil directeur guidés seulement par l'argent et "les opportunités". Moi j'ai fait un BAC G2, un an de prépa Telecom, un DUT Comptabilité-Finance, un master système d'information pour travailler au final en maintenance. Essaie de trouver la logique.
En entretien d'embauche, je serais capable de raconter une histoire cohérente sur mon parcours universitaire mais la vérité est que j'ai avancé en mode aveugle jusqu’à la fin.
Il y'a quelques jours l'une de mes nièces m'a écrit : "Paa j'ai besoin de ton aide pour choisir ma formation". Son message était suivi d'une liste de spécialité pour la licence. Derrière son message ce que j’ai lu c'est : "mon tonton riche, je peux faire quelle formation pour gagner autant d'argent que toi ?". Dans tout ça 5 francs même je n'ai pas.
Pour être plus sérieux, la question de l'orientation ne peut pas se résumer à une liste de spécialité à choisir. Idéalement il faudrait travailler dans un domaine qu’on aime. Malheureusement on ne peut pas vivre de ce qu’on aime et d’eau fraiche. Au-delà de cet idéal, je dirais qu'il faut choisir une formation qui oriente vers un travail dans lequel il y'a de la pénurie et qui rémunère bien. Parce qu'à la fin de la journée il faudra payer les factures. Et peut-être aider les parents qui n'ont pas de retraite.
La limite de cet approche pragmatique est d'avoir une vie fade. Oui parce que l'argent ne résout pas tous les problèmes. Aujourd’hui, le vrai luxe, ce n’est pas de choisir une formation qui paie. C’est de trouver un métier qui parle à ton âme, et te permet quand même de payer les factures. Choisir une formation n’est pas une chose anodine. On doute, on hésite, on se demande si on fait le bon choix.
C’est pour répondre à ce genre de questions que, dans la communauté Campus Mbe, une attention
particulière sera portée à l’orientation.
Pas pour vous dire quelle est la “meilleure” formation à faire.
Mais pour vous donner des clés concrètes — afin de vivre dignement de votre travail, sans avoir une
vie dénuée de sens.
Et dire que tu n’es là que depuis deux ans. 💛
Aujourd’hui, Kimia fête son anniversaire.
Pendant qu’on lui chantait le fameux « joyeux anniversaire », je l’ai regardée sourire…
Et j’ai réalisé à quel point son petit visage embellit mes journées.
C’est le genre d’enfant qui déborde d’énergie, et qui trouve toujours le moyen de te faire exploser de rire, même quand tu rentres cassé en deux.
Et là, une pensée m’a traversé l’esprit : on dit souvent que chaque enfant est différent…
Moi, je crois que chaque enfant vient avec sa qualité de bonheur.
Et la qualité que Kimia m’apporte est « bobé ». Merci ma fille, de pimenter ma vie. Tu rends mes journées plus vraies, plus vivantes.
Joignez-vous à moi pour souhaiter un joyeux anniversaire à ma Kimia . 🎂💫
En écrivant ces lignes, je me suis dis que le bonheur n’est pas dans les grandes choses.
Il est dans ces petits visages, ces rires, ces présences qui nous réparent sans le savoir.
Si quelqu’un met de la lumière dans ta vie, dis-le-lui.
N’attends pas un anniversaire pour le faire.
———————
(P.S. aujourd’hui, j’avais prévu de parler de santé. Mais ici, je parle surtout de ce qui me fait vibrer. Et Kimia en fait partie.)
Aujourd’hui, j’ai récupéré Akil et Melody à l’école pour déjeuner ensemble.
Le matin, j’avais pris soin de leur demander :
— « Vous avez une préférence pour le menu ? »
Réponse unanime :
— « Papa, on te laisse choisir. »
Sauf que… Papa a allumé son PC, et a complètement oublié de réfléchir au menu 🤦🏽♂️.
À midi, au moment de les récupérer à l’école je leur redonne une chance :
— « Les cocos, c’est votre dernier mot, vous choisissez quoi ? »
Encore la même réponse :
— « Papa, on te laisse choisir. »
N’ayant rien prévu, je sors mon joker :
— « Alors, exceptionnellement, on va au McDo ! »
Et là… explosion de joie dans la voiture. Comme si la Côte d’Ivoire venait de marquer en finale de Coupe d’Afrique 😅.
C’est à ce moment que Melody m’a lâché cette phrase :
— « Papa, c’est ce que je voulais te dire ce matin, mais j’avais peur. »
Je lui ai répondu en souriant :
— « Ma chérie, tu n’as jamais à avoir peur de me dire ce que tu veux. Dans le pire des cas, je te dis non. »
Mais sa phrase m’a marqué. J’ai réalisé que, peut-être, je lui avais déjà transmis cette idée que certains désirs sont interdits. Moi qui ai souvent présenté McDo comme « le diable », j’ai créé une hésitation dans son cœur d’enfant.
Alors je m’interroge :
👉 Pour transmettre de bonnes habitudes alimentaires, faut-il interdire totalement la junk food et les sucreries (au risque de créer un manque) ?
Ou bien exposer les enfants à tout, et espérer qu’ils deviennent sages d’eux-mêmes plus tard ?
Interdire crée le manque. Autoriser sans limites crée l’excès. Le vrai boulot de parent, c’est d’enseigner la mesure.
Raoul Mbe,
Mais… c’est quoi, réussir ?
Et surtout, peut-on vraiment partir chercher quelque chose qu’on ne connaît pas ?
Je suis convaincu que l’une des principales raisons de la frustration de beaucoup de candidats à l’exil, c’est le manque de clarté.
Beaucoup partent avec une image floue : “réussir”, ça veut dire avoir des papiers, un bon salaire, ou une belle voiture, envoyer l’argent au pays, construire sa maison au village… C’est ça réussir ?
Mais très vite, ils découvrent que tout ça ne suffit pas à remplir le vide intérieur. Parce qu’à la fin, la vraie réussite, c’est peut-être simplement de se sentir aligné entre ce qu’on veut, ce qu’on fait, et ce qu’on est.
C’est pour cette raison que, dans notre communauté — Campus Mbe — nous mettons un point d’attention particulier sur la question de la réussite. Le but n’est pas de vous donner une définition toute faite. Mais de vous aider à explorer plusieurs chemins, à construire votre propre vision de la réussite, et à la faire évoluer au fil du temps…
…sans jamais renier vos valeurs, vos racines, ni ce que vous êtes.
]]>
En fait, dans le département de l’Isère, pour être arbitre de football il fallait :
- Avoir une licence avec une équipe du championnat
- Avoir un diplôme du District de football de l’Isère
C’était pour moi l’aboutissement de 6 longues années pendant lesquelles je courais nuit et jour entre job étudiant, vie sociale et études. Ce diplôme était la raison pour laquelle je supportais toutes les difficultés du quotidien. Je me disais souvent : “Raoul, le plus important c’est ton diplôme. Le reste là, c’est rien.”
Ce jour-là, j’étais content, je ressentais une petite sensation de liberté, un gros milestone comme on dit. Mais en même temps, j’avais la boule au ventre. En fait, mon titre de séjour devait expirer 3 mois après et je devais trouver une raison de squatter le territoire français.
Le Cameroun me manquait, mais malgré toutes les difficultés en France, je n’avais pas prévu de rentrer m’y installer. Je devais donc trouver une couverture pour ne pas me retrouver sans papiers.
Pour la petite histoire, tous les étudiants camerounais en France ont un titre de séjour étudiant. C’est ce document qui leur permet de rester légalement sur le territoire français. À la fin des études, ils doivent changer de titre de séjour.
Et c’est souvent là où l’acteur meurt dans son film. À la fin des études, chaque étudiant camerounais avait le droit de demander l’APS (Attestation Provisoire de Séjour). Un titre de séjour de 6 mois renouvelable une fois. Ce titre de séjour permettait de trouver du travail ou de créer une entreprise sous certaines conditions.
Le problème est qu’en tant que jeune diplômé, le monde du travail ne t’attend pas les bras ouverts et souvent 1 an ne suffit pas pour trouver un travail en lien avec ton diplôme ou créer une entreprise. Pour ne pas se retrouver en situation irrégulière, de nombreux étudiants se lancent dans des schémas compliqués.
Sans jugement !
J’ai vu certains gars faire 3 masters, d’autres se marier avec des gens qu’ils n’aimaient pas, ou bien même faire des enfants. Sans oublier les étudiants qui se transforment en réfugiés en fin de parcours.
En tout cas, beaucoup se compromettent. Renient leurs valeurs allant souvent même jusqu’à la déshumanisation pour avoir leurs papiers. Sur le coup, on ne réalise pas souvent l’impact de ces décisions pour la suite de nos vies.
Dans chaque parcours migratoire, il y a une violence silencieuse, une pression psychologique, un sacrifice et une solitude dont les histoires romancées des réussites des "mbenguistes" ne mentionnent jamais. Mais ces réussites sont elles synonymes d’épanouissement ?
Aujourd’hui, avec du recul, je réalise que le visa étudiant n’était pas seulement un accès aux études universitaires. C’était une porte. Une porte vers l’inconnu, vers les choix difficiles, vers les compromis parfois douloureux.
Ce parcours m’a appris que l’exil n’est pas qu’une question de papiers, c’est une question de dignité, de résilience et de rêves qu’on refuse d’abandonner.
À tous ceux qui arrivent vers ce tunnel, je vous dis : tenez bon. Gardez vos rêves intacts. Ne laissez pas le système vous voler votre humanité. Et surtout, n’oubliez jamais pourquoi vous êtes partis.
En fait, à Mokolo, mes collègues avaient presque tous les profils. Je voyais des ingénieurs vendre des chemises. Des licenciés compter la monnaie derrière les comptoirs. Des titulaires de master courir derrière les clients pour appâcher. Alors je me disais : si même eux n’ont pas trouvé de place, moi je vais devenir quoi ?
Et quand je leur demandais comment ça se fait qu’ils se retrouvent au marché, la réponse était souvent la même : mon petit, est-ce que j’ai le réseau ?
Et moi justement je n’avais pas de réseau. Dans ma famille, presque tout le monde était commerçant en dehors de deux oncles qui étaient enseignants. Je me demandais comment ne pas finir au marché comme eux, après tant d’études. J’avais une idée en tête : trouver le réseau d’un concours et convaincre mes parents de payer.
Sauf qu’une année on a trouvé un réseau pour le concours des instituteurs. C’était pour l’une de mes sœurs. On a payé mais le jour des résultats son nom n’est pas sorti. Les larmes ont coulé. Le zolo était entré 😎. Ce jour-là, j’ai compris que la terre était sale. Que même pour payer, il fallait avoir le réseau.
Toutes ces petites expériences m’ont amené à perdre espoir dans ma capacité de trouver un quelconque métier de bureau après mes études au Cameroun.
C’est ainsi que le projet d’étudier à l’étranger s’est confirmé. Après, il faut aussi avouer qu’à l’époque c’était à la mode.
Dans mon entourage, les familles envoyaient les enfants en Europe et il fallait faire comme les autres. Sans oublier les mbenguistes qui rentraient en vacances au pays. Mon frère, les gars incarnaient la réussite. Leurs habits, leurs accents et surtout les histoires qu’ils nous racontaient.
Je me souviens encore de l’ami d’un ami qui était revenu d’Italie. J’étais capable de payer le vin aux gars pour qu’ils nous racontent les histoires de Mbeng. Le gars réussissait toujours à placer un mot d’italien ici et là comme une espèce de marque du voyageur. J’entendais presque la musique de ses boîtes de nuit, je voyais les lumières qu’il décrivait. Je buvais ses mots comme la Smooth. Ça me faisait rêver. Il me faisait voyager sans visa.
C’est comme ça qu’après mon baccalauréat en 2008, quand mes amis s’inscrivaient à SOA, Douala, la Catho et MATANFEN, moi j’étais inscrit à Der Erfolg à la carrière. Une école de cours d’allemand. Je préparais le ZiDAF moi.
J’étais inscrit a SOA pour me couvrir. Il ne fallait pas quand même dire à tout le monde que je cherches le voyage. Quand les gars me demandaient : tu fais quoi ? Je disais que je suis étudiant en SECO à SOA. Pourtant dans ma tête, j’étais déjà en route.
Or quitter l’Afrique ce n’est pas voir bébé. Sans m’en rendre compte je m’étais moi même inoculé le virus de Mbeng. Mais ca c’est une autre histoire.
Aujourd’hui encore, au Cameroun, pour beaucoup de jeunes de ma génération, partir chez « les blancs » est l’ultime espoir de s’arracher des griffes d’un système qui étouffe les rêves.
Voyager n’est plus seulement un projet personnel, c’est un changement de statut social. Dans l’imaginaire collectif, prendre l’avion suffit à incarner la réussite. Peu importe si tu as de l’argent, peu importe qui tu es ou ce que tu sais faire : le simple fait de partir est célébré.
]]>Au Cameroun, je n’écoutais pas le bikutsi ni le makossa. Ce n’était pas mon truc. Je préférais Kery James, Sefyu, P-Square, Fally Ipupa, 2Face ou DJ Arafat.
C’est en Ukraine, à des milliers de kilomètres, que Jovi, Charlotte Dipanda, Lady Ponce, Dina Bell et Tom Yoms ont commencé à tourner à fond dans ma playlist. Comme si l’exil avait rallumé une oreille que je n’avais jamais tendue.
Aujourd’hui encore, même si j’habite en France, YouTube me rappelle ma propre contradiction : en 2024, mes artistes les plus écoutés étaient Cysoul, suivi des rythmeurs ABC (pour les vrais connaisseurs 😅).
Je ne suis pas un cas isolé. J’ai l’impression que les gens qui, au Cameroun, n’écoutaient que du rap US se retrouvent en train d’écouter l’assiko et le benskin dans leur salon en France.
Alors je me suis souvent demandé : pourquoi faut-il s’exiler pour apprendre à aimer intensément ce qu’on avait depuis toujours ?
Le week-end dernier, j’ai creusé et je crois avoir trouvé une partie de la réponse : les habitudes.
En fait, nos habitudes — alimentaires, sociales, religieuses, langagières — sont comme des racines. Quand on vit au pays, elles sont tellement naturelles qu’on n’y pense même pas.
Elles sont liées au système de récompense du cerveau : elles créent du confort et nous procurent un sentiment de stabilité. Quand elles disparaissent brutalement, le cerveau le vit comme un sevrage. Leur absence devient douloureuse.
C’est ce qui nous arrive une fois déplacés : on découvre que ce qui nous tenait debout, c’étaient ces petits rituels répétés.
Alors on cherche à compenser, on développe des stratégies d’adaptation en écoutant la musique qu’on n’avait jamais choisie mais qui était tout autour de nous.
L’exil nous apprend que parfois, ce qui nous manque le plus, ce n’est pas le pays. Ce sont nos propres habitudes.
]]>En gros, qu’il arrive quoi.
Comme si le seul fait d’entrer sur le territoire européen était déjà une réussite. Pourtant, cette étape n’est rien devant le véritable challenge que représente l’exil.
Moi, j’ai quitté le Cameroun en novembre 2011. À peine arrivé, je devais commencer l’université.
J’étais enthousiaste. Le premier jour de classe, il faisait -12 degrés à l’extérieur. C’était mon premier hiver, mais à 5h du matin j’étais déjà réveillé… pour un cours qui commençait à 14h.
Hier soir, sur un statut WhatsApp, je suis tombé sur la photo d’une dizaine d’étudiants camerounais valises flambant neuves, sourire accroché au visage et poster de mbenguiste qui venaient à peine d’arriver à l’aéroport de Bruxelles pour poursuivre leurs études.
C’est sûrement l’accomplissement d’un rêve.
Certains ont probablement jeûné pour la demande de visa. C’était peut-être leur premier vol en avion. Leur première fois d’arriver dans un endroit aussi beau et propre.
Je les ai regardés et j’ai souri : j’ai vu mon propre visage d’il y a 13 ans
Mais je sais aussi ce qui les attend. Ils doivent être surexcités. Mais comme souvent, quelques semaines plus tard, viennent les difficultés du quotidien, les doutes et le mal du pays.
Chaque année, c’est la même chose. on envoie nos jeunes à l’autre bout du monde comme on envoie un colis : sans la moindre préparation. Comme si on les vendait.
Beaucoup n’ont jamais passé une nuit seuls au Cameroun, mais on les expédie en Europe avec un simple visa et des valises pleines de rêves. Comme si c’était facile. Pourtant, chaque année, on entend parler de la détresse de ces jeunes.
En voyant cette photo, une question m’a frappé :
Je ne parle pas de comment trouver un job ou remplir un formulaire : Google et YouTube débordent déjà de tutos pour ça.
Mais les choses invisibles : L’histoire, la culture et les codes qu’on croit secondaires mais qui décident en réalité de tout. Comprendre pourquoi il faut tenir un budget et comment. Pourquoi les relations se construisent différemment.
L’immigration telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui est une forme moderne de sacrifice des jeunes Africains. Le système et les familles complices créent une grande vulnérabilité. La seule arme, c’est la transmission des codes invisibles.
Alors j’ai pris une décision : écrire.
L’idée est d’écrire à la personne que j’étais il y a 13 ans, quand j’ai quitté le Cameroun. Écrire à ceux qui arrivent aujourd’hui, le cœur battant, persuadés que le plus dur est derrière eux.
Dire à ces jeunes ce que les jeunes Européens savent, mais qu’eux ignorent. Pas pour qu’ils deviennent des “petits blancs”, Mais pour qu’ils comprennent le comment et le pourquoi des choses.
Parce que personne ne devrait arriver en Europe en tâtonnant comme nous l’avons fait.
Si tu penses que ce texte peut aider quelqu’un que tu connais, partage le. Plus il y aura des personnes intéressés, plus j’aurai la force de transformer cette idée en un vrai guide.
]]>En période normale on pouvait facilement être 16 personnes dans la maison. Moi, j’étais le 6e enfant de cette équipe bien mélangée. J’ai 4 frères et 4 sœurs.
Mon père et ma mère étaient tous deux commerçants, au marché de Mvog-Mbi et d’Ékounou. Mon père quittait la maison à 7h et revenait à 20h, sept jours sur sept. Les vacances n’existaient pas. Ma mère aussi travaillait du lundi au dimanche, avec un peu plus de souplesse. Quand j’y pense, presque tout le monde dans ma famille proche et éloignée était commerçant.
Pour mes parents, le succès à l’école était le meilleur chemin vers la réussite. La règle était simple : tu avais droit à quelques plaisirs si tu avais de bonnes notes à l’école.
Il faut aussi avouer que, comme tout adolescent qui se respecte, j’avais découvert la vie. Je me reposais sur les bases solides que j’avais acquises avant. Mon objectif était d’avoir les notes me permettant de passer en classe supérieure.
J’ai eu la chance d’être bien accompagné pendant tout mon cursus scolaire. Résultat : je n’ai jamais redoublé une classe.
Dans le quartier, j’avais plein d’amis. Notre seule contrainte : rentrer avant la tombée de la nuit. On passait nos journées à jouer dans la cour des maisons jusqu’à épuisement. Le foot, la course poursuite, le ndochi babouche, 1, 2, 3, 4 soleil pour ne citer que ceux là 😂.
Je n’ai pas toujours eu de cadeaux à Noël, ni fêté mes anniversaires. Mes vacances, c’était soit au village avec mes grands-parents, soit au marché à aider ma famille. Mais j’étais heureux. Plus qu’heureux.
Quand j’y pense ça me conforte à l’idée que « le confort » actuel en Europe n’est pas l’unique modèle de bonheur. Et que le bonheur n’est pas seulement dans les cadeaux ou les vacances, mais dans la famille, les amies, l’effort et la simplicité.
Ceux qui ont grandi comme moi savent : on n’avait pas tout, mais on avait l’essentiel. Et c’est cet essentiel qui nous a portés jusqu’ici.
]]>En revenant du Cameroun, j’ai offert à mon fils un cadeau un peu particulier : tous les livres du programme de CE1 au Cameroun.
Hier matin, avant de partir jouer, son défi était simple : lire le premier chapitre du livre de littérature CE1 et me raconter ce qu’il avait retenu de l’histoire.
Quelques minutes plus tard, le gar débarque sur mon bureau (dans ma chambre) : Papa, tu es en réunion ? Je suis prêt à te raconter l’histoire de Benjamin.
J’étais en télétravail, alors je lui réponds : Attends un peu, je termine et je viens t’écouter.
À ma pause, je l’appelle. Il se lance. Et là surprise : il ne me résume pas un chapitre. Il me résume tout le livre. C’était un peu long et tout mélangé 😅. Au lieu de suivre la consigne, il avait tout dévoré d’un coup.
Intrigué, je lui ai demandé de relire le premier chapitre devant moi et de répondre aux questions. Le résultat m’a bluffé, même si la prononciation du nom du directeur, M. Ayolo, manquait un peu d’accent du terroir camerounais 😅.
Je l’ai félicité. Il est parti jouer, fier. Et moi encore plus fier que lui. En fait, j’ai réalisé que j’ai tendance à souvent sous-estimer ses capacités 😔.
Pire : j’ai cette mauvaise habitude de le comparer à moi, à son âge.
Je ne lui dis pas directement, mais dans ma tête je me fais des réflexions du genre : “Est-ce normal qu’il ne sache pas encore faire ça ? Moi, à son âge, j’y arrivais déjà.”
Sauf que c’est faux : je n’ai presque aucun souvenir précis de moi à son âge. Juste que j’étais premier de la classe en primaire et que tout s’est arrêté quand je suis parti à la recherche du fruit défendu. 😅
Plus sérieusement ce dont je me souviens vraiment, c’est que chez moi, on m’a toujours répété que j’étais bon, que j’étais à la hauteur. Et ça, je ne l’ai jamais oublié.
Aujourd’hui, on entend partout que les enfants sont fainéants, collés aux écrans, incapables de se concentrer, que le niveau est trop bas. Même ceux qui étaient moyen enfants répètent aussi ça 😂.
Ce flot d’idées négatives nous met une pression folle comme parents. On finit par douter de nos propres enfants. On se demande :
Si nous même on se mets à douter, qui pourra croire en eux ? Chaque époque a ses défis. Nos parents aussi pensaient qu’on était mous. Pourtant nous sommes là, à gérer nos vies, nos familles, nos responsabilités. Certains parmis nous s’essaient même à éduquer des enfants 😎.
Alors, la plus belle chose que nous puissions transmettre à nos enfants, ce n’est pas une école prestigieuse, ni plein de cadeaux, ni des notes parfaites.
C’est ce super-pouvoir invisible : la confiance en soi.
Parce qu’un enfant qui doute commence toujours sa course avec un handicap.
]]>La différence n’est pas seulement dans l’emploi du temps, mais dans la façon de voir la vie, dans les priorités qu’on donne aux choses.
À l’heure où toutes les routines sont chamboulées, où les choses à faire s’entassent dans les to-do lists ou dans un coin du cerveau, il est important de connaître ses priorités et de continuer à exécuter.
Les jours passent pour tout le monde. Mais les vies se construisent différemment. Une brique posée chaque jour fait un mur.
Une brique posée quand on y pense fait un tas de briques.
]]>En 2017 quand j’ai annoncé à ma mère que je devais me marié, elle était paniquée. Après plusieurs jours d’échanges elle m’a dit : «Raoul est-ce que tu crois que tes enfants vont souvent venir au Cameroun si ta femme n’est pas Camerounaise ».
J’ai compris ses peurs et je l’ai rassuré. Mon père lui m’a dit : « Raoul, si tu penses que c’est la bonne personne je te suis ».
Stéphane a payé la salle, Ronel a payé le DJ, Idriss a ramené son gros SUV pour accompagner les mariés, Guillaume et Éric ont géré la nourriture, Sabine était photographe. Brice a fait les papiers au pays. Martial, Franck, Carole, Elodie, César, Arsène, Tassa, George……
Presque tout le monde a participé.
Moi, j’ai décidé de me marier sans attendre d’avoir toutes les garanties. Je n’avais qu’un critère : l’état d’esprit. Et un guide : le feeling.
Pleins de belles choses et aussi beaucoup de challenges. Mais les problèmes c’est pour les Hommes et pour l’instant on est dedans.
Je sais que les histoires que je racontes ici peuvent vous faire croire que je suis immature mais j’ai une petite expérience si vous avez les questions/problèmes de mariage n’hésitez pas à venir poser questions.
On ne sais jamais 😎.
]]>En 2011, quand je suis arrivé en Ukraine, je ne savais rien cuisiner d’autre que des omelettes. Pendant deux semaines, c’est tout ce que j’ai mangé le midi et le soir.
Un jour décidé à changer de menu, j’ai tenté les spaghettis sautées. J’ai tout acheté, j’ai suivi à la lettre la recette trouvée sur internet.
Résultat : toute la marmite a fini à la poubelle.
Aujourd’hui, grâce à l’apprentissage et la pratique. Je peux cuisiner du ndolè, de la banane malaxée, un gratin dauphinois ou des pâtes à la carbonara.
Apprendre à cuisiner m’a sauvé plus d’une fois. Pas seulement pour manger. Mais aussi à impressionner les petites.
Si je peux me permettre un petit conseil : apprenez à doser le sel, à chauffer l’eau et à faire du vélo avant de rêver d’Europe.
Même si ça peut paraître anodin ça vous évitera de vous empoisonner.
]]>As tu déjà pensé à tout quitter pour rentrer chez toi ? Cette idée m’a obsédé pendant des années.
Selon une étude d’Intelcia, 71 % des membres de la diaspora africaine installée en France souhaitent rentrer en Afrique. Cependant, ce chiffre doit être pris avec précaution, car il s’agit d’un pourcentage basé sur un échantillon de seulement 800 personnes.
Si je fais une analyse rapide basée sur mon entourage, je dirais la même chose : un bon 70 %. Mais combien rentreront réellement ? Là, aucune donnée précise. Si je prends encore mon entourage comme référence, je dirais 5 %.
Beaucoup souhaite rentrer, mais en réalité, très peu passe à l’action, et parmi ceux qui rentrent, nombreux sont ceux qui ne restent pas définitivement.
On entend souvent cette phrase : « Les plus chanceux finiront fous a Mbeng » Même si je trouve cela un peu exagéré, il y a une part de vérité 😁. Vivre à “Mbeng” a ses avantages — moi, je “yamo” — mais la nostalgie de la nourriture, des paysages familiers, ou simplement du lien avec ses proches, peut peser lourd. On néglige beaucoup cet aspect psychologique mais c’est quelque chose de crucial.
En 2018, avec quelques proches, nous avons lancé le projet Avenue Kennedy. On était très enthousiastes à l’époque.
Avec du recul, c’était une véritable folie. Pas tant par rapport au projet lui-même, mais par les motivations profondes qui nous ont poussés à le faire.
On ne pose pas souvent la question sous cet angle, mais c’est essentiel, car cela permet de mettre en lumière des contradictions qu’on ne voit pas toujours au départ.
Qu’est-ce qui peut bien pousser trois personnes installées confortablement en France, avec des projets à long terme là-bas, à investir dans un tel projet pour le Cameroun ? L’argent, diront certains. C’est ce que je croyais aussi à l’époque 😁.
C’est vrai, beaucoup entreprennent au pays pour gagner de l’argent ou contribuer au développement. Mais, en réalité, deux raisons souvent sous-estimées restent déterminants :
Pour moi c’était la volonté de vivre ici et là-bas en même temps. Ce projet me permettait en quelque sorte de faire “l’appacheur” de téléphone à l’avenue Kennedy de Yaoundé à tout moment. En gros “ voyager sans décoller “ ou alors comment masquer une frustration en lançant un projet.
À mon avis, avant de s’engager dans un projet au pays, il faut d’abord se poser cette question essentielle : quelles sont les vraies motivations derrière ce projet ? Pas ce qu’on veut montrer, mais « la vraie vérité ».
Pour ma part, je qualifierais mon expérience avec Avenue Kennedy comme étant “douce et amère”. C’est un mélange de gratitude d’avoir vécu cette aventure et de désespoir face à mes propres contradictions au cours du projet (un jour, on racontera ça — on digère encore 😅).
Les gars, je sais que c’est dur, mais prenez le temps. Posez-vous les bonnes questions avant de vous lancer. Il ya tellement à dire. Les coachs qui pullulent partout sont là pour vous vendre des conseils, pas pour réfléchir à votre place. Prenez le temps de bien comprendre les motivations profondes avant de prendre une décision qui risque de vous donner un coup au moral et faire fondre une partie de votre épargne sur le chemin.
Faut-il rentrer ou trouver un équilibre?
Si ton objectif est de rentrer, prépare toi sérieusement et rentre. Sinon, trouve un équilibre sur place. Ne te laisse pas influencer par la nostalgie et les fanatiques qui prophétisent le pire pour les africains en occident, ouvre les yeux. Regarde autour de toi : il n’ y a pas que du bon mais c’est vivant et plein de belles personnes. Il peut avoir une place pour toi ici, et tu peux contribuer à construire un futur dans lequel toi et ta famille serez épanouis. En tout cas c’est ce que je me dis.
Le pire qui puisse arriver est la perte d’identité cet à dire être incapable de s’identifier pleinement ni au pays d’accueil, ni à celui d’origine.
Même si je fais partie des nostalgiques profonds, « Back n’est pas une fin à Soa. »
Pour moi le vrai défi ce n’est pas de choisir entre partir ou rester, mais de construire un équilibre qui reflète qui nous sommes devenus et de vivre pleinement.
]]>C’est une phrase qu’on entend souvent. Sans trop réfléchir, on pourrait croire que le froid est directement responsable du rhume ou de la grippe 😁.
Mais en y repensant, ça ne colle pas. Par exemple, à Yaoundé, je me souviens que les violentes saisons sèches étaient également propices aux infections respiratoires (rhume et grippe).
Alors, qu’est-ce qui se passe vraiment ? 😎
Hier soir, j’ai creusé un peu, et voici un résumé de ce que j’ai découvert :
En réalité, le rhume et la grippe sont causés par des virus.
Mais pourquoi tombe t-on plus facilement malade quand on ne se couvre pas bien ?
En fait bien que le froid en lui même ne cause pas directement la maladie, il affaiblit notre organisme et nous rend plus vulnérables aux virus. Voici quelques mécanismes :
Et pour la saison sèche à Yaoundé ? L’air sec et la poussière sont probablement les coupables. Mais bon, si des experts passent par ici, je suis preneur d’explications supplémentaires.
Je vais dormir moins bête ce soir!
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